La Fondation pour la Mémoire de l'Esclavage rappelle le rôle de Napoléon dans ce crime contre l'humanité

Par 12/03/2021 - 11:44

Alors que la France, Emmanuel Macron en tête, s'apprête à célébrer le bicentenaire de la mort de Napoléon, la Fondation pour la Mémoire de l'Esclavage rappelle le rôle qu'a joué l'ancien Premier consul dans le rétablissement de cette pratique.

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Napoléon Bonaparte a rétabli sans état d'âme en 1802 l'esclavage aboli par la Révolution, laissant s'instaurer un régime colonial plus ségrégationniste que sous la monarchie, a dénoncé vendredi la Fondation pour la Mémoire de l’Esclavage (FME), en cette année du 200e anniversaire de sa mort.

"Napoléon a agi comme il l’a fait en toutes choses: sans affect, et sans morale", confie à l'AFP son président, l'ancien Premier ministre Jean-Marc Ayrault.

"Cette décision, analyse l'ex-maire de Nantes, n’est pas un accident de parcours mais s'inscrit dans sa pratique du pouvoir et dans son ambition impériale".

Intitulée "Napoléon colonial – 1802, le rétablissement de l’esclavage", cette note, transmise à l'AFP et rédigée par quatre historiens, démontre comment cette mesure s’inscrivait dans la politique coloniale américaine du Premier consul qui rêvait de faire du Golfe du Mexique "une mer française". Elle décrit pour les Noirs le retour vers un régime plus sévère que sous l’Ancien Régime.

"Napoléon veut agrandir l'empire colonial français: c’est son rêve américain. Pour lui, le rétablissement de l’esclavage n’est qu’un moyen au service de ce rêve colonial".

Selon M. Ayrault, "Napoléon est un cynique. Il n’est ni un idéologue raciste, comme les colons qui l’entourent, ni un humaniste abolitionniste, comme l’Abbé Grégoire qui s’oppose à lui".

Cette note des historiens Marcel Dorigny, Bernard Gainot, Malick Ghachem et Frédéric Régent retrace une histoire complexe.

L'esclavage est aboli en 1794 par la Convention mais la mesure n'est pas appliquée partout.

La loi du 20 mai 1802 prévoit le maintien de l'esclavage là où il n'a pas été aboli: à la Réunion, où les colons n'avaient pas obéi à la Convention, et en Martinique qui avait été sous domination anglaise. En Guadeloupe, Bonaparte rétablit l'esclavage, une mesure également appliquée en Guyane.

L'esclavage restera en vigueur jusqu'à son abolition définitive en 1848.

En rétablissant l'esclavage, Bonaparte donne raison - à travers ses décrets et instructions - aux revendications des colons racistes qui voulaient un ordre ségrégationniste plus dur que sous l'Ancien Régime. Ils craignaient les rébellions comme celle de Saint-Domingue où naîtra la République d'Haïti en 1804.

"Napoléon ne fait pas que rétablir l’esclavage. Par des textes spécifiques, (...) il s’en prend aussi aux libres de couleur (Noirs affranchis). Leurs droits sont diminués, les mariages mixtes sont interdits, le métissage est condamné", relève l'ancien Premier ministre de François Hollande

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