À Mayotte, l'Etat veut toujours détruire 1 000 logements insalubres

Par 19/05/2023 - 16:22

L'État prévoit toujours de détruire à Mayotte dans les prochains mois « 1 000 cases identifiées » comme étant des logements insalubres, a indiqué aujourd'hui (19 mai) le préfet de ce département français de l'océan Indien lors d'une visite dans le quartier de Cavani, à Mamoudzou.

    À Mayotte, l'Etat veut toujours détruire 1 000 logements insalubres
Au point mort depuis un mois, l'opération de destructions de bidonvilles va se poursuivre.

Les autorités françaises ont déployé depuis avril des forces de l'ordre en nombre à Mayotte pour préparer et mener une série d'interventions de police regroupées sous le nom de Wuambushu ("reprise" en mahorais).

Cette opération, qui est quasiment au point mort depuis près d'un mois, vise à déloger les migrants en situation irrégulière, pour la plupart venus des Comores voisines, des bidonvilles insalubres du département le plus pauvre de France.

Lors d'une visite ouverte à la presse tôt vendredi à Cavani (nord-est), le préfet, Thierry Suquet, a réaffirmé sa ferme volonté de "lutter contre l'habitat insalubre".

"Les gens vivent dans des conditions insupportables, ils mettent leur vie en danger", a-t-il insisté.

Une quinzaine d'agents de l'Agence régionale de santé, de la préfecture et de travailleurs sociaux étaient présents à ses côtés pour identifier les cases en tôle à démolir. 

A Cavani, "nous en avions recensé 90 par vue aérienne mais nous en avons déjà dénombré 10 de plus", a souligné Psylvia Dewas, en charge de la résorption de l'habitat insalubre à la préfecture.

"Les travailleurs sociaux reviendront ensuite pour réaliser des enquêtes sociales dans le but de proposer des solutions de relogement aux familles", a-t-elle assuré. 

Selon le préfet, sur les 1.000 logements identifiés pour être démolis à Mayotte, "300 ont déjà fait l'objet d'enquêtes sociales".

Les personnes en situation régulière se verront proposer "une solution de relogement au fur et à mesure" mais, a-t-il prévenu, "le principe de démolition n'est jamais remis en question, même si les familles refusent les propositions".

« On va aller où ? » 

"Nous ne savions pas qu'ils allaient détruire nos maisons", lance Nadjim Rouzounati, mère de trois enfants, devant le numéro "62" qui vient d'être marqué à la bombe sur la case de son voisin à Cavani.

Cette femme en situation régulière dit habiter ici depuis près de 30 ans. "Et maintenant, on va aller où ?", s'inquiète celle qui n'a pas encore reçu de proposition de relogement.

La démolition du bidonville de Cavani devrait intervenir "dans deux à quatre mois", selon le préfet.

Avec ce quartier, huit périmètres devant être démolis ont été définis par arrêté par la préfecture. "Et d'ici quelques semaines, huit autres arrêtés de périmètres seront pris, pour recouvrir au total 1.000 cases", a précisé Thierry Suquet. Après le dépôt d'un arrêté, un délai de cinq semaines doit être respecté avant la démolition, conformément à la loi Elan sur le logement de 2018. 

Le premier bidonville qui doit être démoli dans le cadre de l'opération Wuambushu est le quartier Talus 2, à Koungou, au nord de Mamoudzou. 

Sa destruction, prévue le 25 avril, avait été suspendue la veille par le juge des référés du tribunal administratif. Mais deux décisions de justice, prises par le tribunal administratif le 13 mai puis par la chambre d'appel mercredi, ont depuis donné raison à l'Etat et ouvert la voie au "décasage" - destruction des cases en tôle - de Talus 2, l'un des plus gros bidonvilles de l'île.

Les pelleteuses devraient se rendre sur place "très rapidement", selon le préfet, pour démolir 135 cases en tôle dans ce quartier informel. "Environ 70 familles seront relogées et la moitié a déjà intégré un nouveau logement", a assuré Thierry Suquet.

Tags