[DOSSIER] Qualité de l'eau du robinet en Guadeloupe : quelle organisation des contrôles ?

Par 05/10/2023 - 16:00

En Guadeloupe, les alertes à la contamination de l’eau se multiplient dans différentes communes de l’archipel. Peut-on se fier à l’eau qui coule dans notre robinet ? Comment s’organisent les contrôles de l’eau sur notre territoire ? Ce sont tant de questions auxquelles nous avons tenté de répondre avec nos invités lors de notre émission Décryptage du Mercredi de ce 4 octobre. Voici ce qu’il fallait retenir.

    [DOSSIER] Qualité de l'eau du robinet en Guadeloupe : quelle organisation des contrôles ?
Photo : ES

Ce lundi 2 octobre, encore, trois communes ont été frappées par une interdiction de consommation de l’eau du robinet. Il s’agit des communes de Sainte-Anne, de Saint-François et de la Désirade, se retrouvant dans l’impossibilité d’utiliser l’eau pour se laver ou encore se brosser les dents.

Ces situations remettent en question la gestion de l'eau sur notre île qui est déjà, on le sait au cœur de nombreuses problématiques. Bien que l'eau soit normalement le produit le plus contrôlé en France, la Guadeloupe semble ne pas suivre la même rigueur.

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Nous avons donc demandé à quelques personnes si elles faisaient confiance aux contrôles menés sur notre territoire, des contrôles censés garantir la qualité de l’eau du robinet. Écoutez leurs réactions :

Des contrôles effectués en nombre

Face à ce constat, une question revient souvent : la qualité de l’eau s’est-elle dégradée en Guadeloupe, où y a-t-il plus de contrôles menés sur le territoire ?

À noter d’abord que le suivi sanitaire de l’eau comprend à la fois la surveillance exercée par la personne responsable de la production et distribution de l’eau (SMGEAG, syndicat mixte de gestion de l’eau et de l’assainissement de Guadeloupe) et le contrôle sanitaire mis en œuvre par les Agences régionales de santé.

Selon le ministère de la Santé, ce premier doit notamment assurer une vérification régulière des mesures prises pour protéger la ressource utilisée, d’une vérification du fonctionnement des installations, ou encore de la réalisation d’analyses effectuées en différents points en fonction des dangers identifiés dans le système de production et de distribution de l’eau. Le second a pour rôle de réaliser un programme de prélèvements et d’analyses d’eau en différents points des installations de production et de distribution d’eau, l’expertise sanitaire des résultats d’analyses, mais aussi la prise de décision relative aux mesures de l’administration (autorisations, gestion des non-conformités, etc). Notez toutefois que ces missions attribuées au SMGEAG et à l’ARS vont encore plus loin.

Pour Jacques Davilla, membre de la commission de surveillance au SMGEAG, l’on ne peut pas nier que la qualité de l’eau s’est fortement dégradée avec des habitants qui se retrouvent à boire « de la merde » au robinet. De son côté, Muriel Aloph, ingénieur à la direction de la sécurité sanitaire (DSS) de l’Agence régionale de santé, les contrôles sont nombreux, voire plus nombre que ce qu’exige la réglementation.

Sur le versant pesticide, le contrôle sanitaire en Guadeloupe est renforcé, là où dans l’hexagone on peut faire des analyses une fois tous les deux à cinq ans, en Guadeloupe on va faire des analyses une à douze fois par an au niveau des captages. Sur la problématique chlordécone, on fait deux à six fois plus de prélèvement que ce que demande la réglementation nationale. Cela pour prémunir et préserver la population au niveau de sa santé.

À cela s’ajoutent des recherches de nouvelles molécules pour les intégrer au contrôle sanitaire.

Pas de danger sanitaire imminent

Mais entre le temps du prélèvement pour analyse et de la transmission de l’information d’interdiction de consommation, y a-t-il un risque pour les usagers ?

Nadia Bougrer, directrice du laboratoire d’hygiène de l’environnement de l’Institut Pasteur en Guadeloupe le rappelle, dans le cadre des autocontrôles commandés par le syndicat mixte, entre le prélèvement à jour-0 et les premiers résultats négatifs et/ou positifs des analyses physico-chimiques et bactériologiques, il se passe 48 heures minium. Pour les analyses recherchant des pesticides, cela peut aller jusqu’à 72 heures.

Concernant un éventuel risque pour la santé en cas de consommation d’une eau contaminée, Muriel Aloph de l’ARS Guadeloupe dit :

Il faut savoir que les contrôles que l’on fait, les non-conformités que le syndicat a l’obligation de communiquer permettent de se prémunir de ce risque. Le risque est calculé sur toute une vie. On regarde si par rapport à la limite fixée on répond ou pas. Si on ne répond pas, cela permet justement de préserver la santé des Guadeloupéens. Le fait qu’il y ait cette communication montre la transparence.

Un propos approuvé par le directeur du SMGEAG, Marcus Agbekodo :

Sur la question sanitaire, ce n’est pas parce que je vais avoir une turbidité élevée que ça va poser une question sanitaire au bout de 48h. Ce n’est pas parce que je vais avoir des résultats qui vont être retardés de 48h que ça devient un danger imminent. Les concentrations en aluminium, on surprotège la population, il n’y a pas de danger imminent. Je prends moins d’aluminium quand je bois de l’eau même interdite, j’en prends beaucoup moins que quand je fais un pique-nique avec du papier alu ou que je cuisine dans une casserole en alu. 

Le directeur du syndicat a aussi rappelé que 200 millions d’euros ont été investis dans un plan pluriannuel sur cinq ans afin de mener les travaux nécessaires afin de remettre à niveau les usines et mettre fin à ces problématiques de coupures d’eau, mais également de contamination.

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