La Colas et sept salariés jugés pour avoir surfacturé l'enrobé du TCSP

Par 28/09/2021 - 08:55 • Mis à jour le 26/01/2023 - 13:32

Depuis hier (lundi 27 septembre 2021), le tribunal judiciaire de Fort-de-France se penche sur un scandale vieux de 13 ans. Celui de la surfacturation des chantiers d'enrobé du TCSP et de l'autoroute.

    La Colas et sept salariés jugés pour avoir surfacturé l'enrobé du TCSP

Malgré le temps écoulé depuis la dénonciation des faits, c'est une affaire encore fumante sur laquelle se penchent les magistrats du tribunal judiciaire de Fort-de-France.

Il y a 13 ans, on apprenait que quelques milliers de tonnes de béton bitumineux avaient été frauduleusement facturés aux collectivités lors de la confection des voies du TCSP. Depuis hier, 7 personnes comparaissent dans le box des accusés.

Il s'agit de salariés de la Colas et la société elle-même Les faits sont qualifiés de manœuvres frauduleuses en réalisant des faux.

L'affaire avait éclaté en aout 2008, quand un ancien cadre de la Colas avait écrit au parquet de Fort-de-France. L’ex salarié avouait qu’il avait réalisé des faux à la demande de ses responsables pendant près de 5 mois. Il s’était ainsi exécuté sans se poser de question. 

Des faits dont se souvient l'ancien chef d'industrie à la COLAS, qui avait refusé de participer à cette escroquerie. Il a accordé son témoignage exclusif à RCI.

La personne qui est actuellement à mon poste avait dit une fois qu'il avait surpris un des mis en examen en train de faire des faux bons. Lui même avait récupéré des documents dont il allait se servir. Moi, comme je n'avais pas vu ces documents, je ne pouvais pas réagir. D'autant plus que j'avais le directeur contre moi

Il apporte quelques précisions sur le mode de fonctionnement

La stratégie est un peu longue à expliquer. Le directeur de l'époque qui a tout organisé m'a mis la pression dès son arrivée. Il me disait qu'il avait besoin d'un chef de poste alors que j'étais déjà chef de poste. Un jour, il m'a invité dans son bureau, il m'a présenté le listing de production comme d'habitude et il m'a demandé de changer les chiffres qui étaient sur le listing. J'ai refusé. À partir de là, il a cherché à me renvoyer de mon poste, à essayer de m'envoyer en Guadeloupe. Il était vraiment à l'aise dans ce fonctionnement là. La façon dont il procédait montrait que ce n'était pas un coup d'essai

Grâce aux premiers aveux, la justice a pu mener une enquête très minutieuse. Le moindre document de ce marché public de l’enrobé de l’autoroute a été inspecté pour en connaître les tenants et les aboutissants.

Ainsi, les enquêteurs ont découvert les factures de livraisons fictives d’enrobé adressées, au conseil régional glissées au milieu de vrais documents. Le préjudice subit par le conseil régional avoisine 600 000 euros.

L'ancien salarié qui a signalé les faits à la justice a expliqué aux inspecteurs qu'il s'agissait d'une pratique courante.

Une affirmation démentie par le directeur de la Colas de l’époque. Pourtant dans le même temps, d’autres salariés auditionnés par la justice ont avoué que les quantités avaient été gonflées par le biais de faux tonnages.

Autant d’éléments qui ont permis que sept personnes soient présentées devant la justice depuis hier. Parmi eux, le président de la SAS Colas Martinique. Son avocate, maître Catherine Rodap a expliqué la position de son client

C'est une instruction qui a duré 13 ans. Cette affaire ne peut pas être jugée en une seule journée. Il nous faut un temps qualitatif pour cela. D'ailleurs, le tribunal a retenu cette option pour entendre les témoins mais aussi pour permettre les plaidoiries de façon à pouvoir transmettre une véritable argumentation. Mon client a fait le déplacement. Il a assisté aux débats. Sa démarche est de pouvoir rentrer dans une démonstration en droit et en fait pour établir sa version de faits. Le concernant, il n'y avait aucune intention, aucun acte matériel et intentionnel

Cette première matinée d'audience a été consacrée aux demandes de nullités prononcées par les avocats. L'avocat de la Colas a également soulevé une question prioritaire de constitutionnalité. 

Poursuivie en tant que personne morale, l'entreprise espérait ne pas être poursuivie si elle obtenait gain de cause sur la QPC. Une requête finalement écartée par le tribunal.

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