Assassinat et escroquerie aux Assises : « responsabilité minimisée » ou relation toxique ?

Par 07/03/2024 - 14:21 • Mis à jour le 07/03/2024 - 14:50

Le procès de Christelle C., Guadeloupéenne, se poursuit aux Assises de Bobigny. Elle est soupçonnée, avec son ex-mari, d'avoir tué un homme en 2020 en Seine-Saint-Denis après avoir soutiré plusieurs dizaines de milliers d'euros à la tante de ce dernier.

    Assassinat et escroquerie aux Assises : « responsabilité minimisée » ou relation toxique ?
©AD

Au 3ème jour d'audience, la cour a entendu un peu plus Christelle C. Dans son box, toujours vêtu de couleurs sombres, petite silhouette, elle n'a finalement que peu parlé de sa personnalité. Quand la présidente lui demande de parler d'elle, l'accusée se présente rapidement comme "une personne bienveillante" qui a "grandi avec des principes et des valeurs" auprès de parents "aimants" en Guadeloupe. Mais très vite, ses propos ne mentionnent plus que le père de sa fille, Richard Alexis, dessinant clairement une ligne de défense. Lors de l'instruction, Christelle C. avait affirmé qu'elle n'avait pas cherché à interrompre son ex-mari le jour des faits car il était "énervé", parce qu'elle avait "peur de le décevoir", que c'est à sa demande qu'elle l'a pourtant accompagné, qu'elle a simulé un cambriolage, nettoyé la scène, s'est débarrassé des armes du crime.

Longuement, d'une voix parfois hésitante comme cherchant à retrouver le fil de son récit, l'accusée parle ainsi de leur relation qui "a commencé à se dégrader" dès qu'ils se sont mariés en 2010. "Il voulait tout diriger dans notre vie commune, il disait que je ne faisais pas bien le ménage, que je gérais mal les comptes, que mes parents m'infantilisaient", décrit Christelle C.

Un ex-mari violent  ?

Elle dépeint ensuite un portrait encore plus sombre. Celui d'un conjoint aux tendances survivalistes, "il voulait que j'achète des boîtes de conserve si la fin du monde arrivait", instable professionnellement, "il changeait tout le temps de boulot" (Richard Alexis, antillais lui aussi, était policier municipal après un début de carrière dans la gendarmerie, ndlr), au "rapport particulier avec l'argent", qui l'isole de sa famille et "en rupture familiale" lui-même. Pire, l'accusée évoque soudain des violences. "On s'est bagarrés plusieurs fois. Une fois, je suis allée aux urgences mais je n'ai pas porté plainte", raconte Christelle C. à la cour. Il l'aurait également forcé à avoir des rapports sexuels, après la naissance de leur fille : "Il me disait que j'avais signé donc je me donnais à lui".

En 2013, Christelle C. tente de quitter une première fois Richard Alexis mais selon ses déclarations, il la convainc alors de rester, ce qu'elle fait aussi pour leur fille. C'est en 2018 que le couple finit par se séparer, à l'initiative du policier selon l'accusée ce jeudi, alors qu'elle avait dit le contraire aux enquêteurs.

Christelle C. est d'ailleurs mise devant ses nombreuses contradictions par l'avocate générale. Sur son histoire familiale, sa scolarité en Guadeloupe qui ne débouche sur aucun diplôme, ses rapports avec son ex mari... "Il y a noir et blanc, je ne sais plus quoi croire, lui dit-elle, et nous n'en sommes qu'à votre personnalité !".

« Tendance à minimiser ses responsabilités » ?

Un peu plus tôt dans la journée, une expertise psychologique de l'accusée avait été longuement présentée et discutée. "Elle aurait pu contribuer de façon plus active à la scène qu'elle a décrite", a notamment analysé l'intervenante qui l'a rencontrée en détention, mettant aussi en avant une "tendance à minimiser ses responsabilités". L'experte a aussi rejeté toute soumission de Christelle C. à Richard Alexis. "Un rapport de fusion jusqu'au-boutiste""une relation toxique peut-être mais pas d'emprise, ils en tiraient profit tous les deux", a-t-elle déclaré à la cour.

L'accusée doit désormais être interrogée sur les faits. Au premier jour d'audience, Christelle C. avait déclaré : "Je ne reconnais pas l'assassinat mais l'escroquerie je reconnais". Elle encourt la réclusion criminelle à perpétuité.

 

Tags

À lire également