[AUDIO] Février 2009 en Martinique : que reste-t-il 15 ans après ?

Par 05/02/2024 - 12:59 • Mis à jour le 05/02/2024 - 14:42

Il y a tout juste 15 ans, le 5 février 2009, débutait le mouvement de contestation sociale qui avait paralysé la Martinique, pendant 38 jours d’une grève générale lancée bien avant la crise des gilets jaunes. Retour avec nos archives et les réactions, aujourd'hui, des protagonistes de l'époque.

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Manifestations du Collectif du 5 février

Le 5 février 2009, des milliers de Martiniquais sont descendus dans les rues de Fort-de-France pour dénoncer la vie chère et les différentes augmentations du prix du carburant à l'époque.

Très vite, le K5F s’était organisé (le Collectif du 5 Février) pour mener les négociations en préfecture avec l’Etat et les représentants du patronat.

Durant plusieurs semaines, l'activité économique de l'île a été complètement paralysée. La grève a aussi été émaillée d’incidents et d’affrontements avec les forces de l’ordre. Le Carnaval avait d’ailleurs été annulé cette année-là.

À ÉCOUTER Ambiance à l'époque, captée par RCI

Sur la trentaine de points de revendications, le K5F avait obtenu notamment le gel des loyers HLM, une augmentation des salaires de 200 € pour les faibles revenus. Ou encore le gel du prix de l'eau et une baisse des prix sur 400 produits de consommation.

« Le RSTA, un élément extrêmement positif »

Albéric Marcelin, syndicaliste CDMT à l’époque, a été membre du collectif et a participé aux 39 jours de négociations.

Il y avait un grand dossier, celui des prix et de l’alimentation notamment. Au-delà, c’était la question de la vie chère. Ce que je retiens comme élément extrêmement positif, c’est le RSTA, Revenu de Solidarité Temporaire d’Activité. 30 000 personnes ont touché ces fameux 200 euros tous les mois pendant 3 ans. Ça fait quand même une enveloppe de 216 millions d’euros. Ce que je retiens également, c’est que nous étions en route sur la grande question de l’autonomie alimentaire, le retour vers le jardin potager. Et malheureusement, quand les choses se sont terminées, on a terminé avec le syndrome du caddie. L’autre image forte, c’est le préfet de l’époque, Ange Mancini, qui portait le tee-shirt du collectif au moment de la signature. Ça a quand même bousculé les consciences

Mobilisation collectif du 5 février 2009

À l’époque, certains observateurs ont estimé que cette grève n’avait pas été suffisamment préparée en amont, à l’image de ce qui s’était fait en Guadeloupe. Philippe Pierre-Charles, l’un des porte-paroles du K5F, livre son analyse.

Le LKP est à l’origine du mouvement en Guadeloupe. Le K5F est un résultat du mouvement en Martinique. C’est toute la différence. Mais, moi ce qui me paraît plus regrettable, c’est que nous n’avons pas tiré toutes les conséquences de ce mouvement. Pendant la mobilisation, la plateforme de revendications a été enrichie au fil des discussions avec les patrons. Malheureusement, il faut la réactualiser aujourd’hui 

« Des vraies questions » mais pas de « vraies réponses »

Il y a 15 ans, Eric Nouvel, actuel directeur de l’ARACT (Agence pour l'Amélioration des Conditions de Travail), était représentant du patronat. Il livre son sentiment.

De vraies questions ont été posées ayant trouvé un fort écho dans la société martiniquaise. Mais la manière d’approcher les choses n’a pas permis, selon moi, d’apporter de vraies réponses. Les problématiques sociales, avec notamment un fort taux de pauvreté, sont toujours très fortes. Nous avons, face à nous, des mutations majeures, tant sur le plan démographique, qu’écologique et qui sont de grands défis à relever. Les mêmes causes produisent les mêmes effets, avec un petit marché et beaucoup de produits importés. En plus, nous sommes éloignés des centres de production. Tout ce qui permettra de développer une part d’autonomie, notamment alimentaire, énergétique, contribuera à la solution, notamment une vraie continuité territoriale 

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