Le 22 novembre 2021 : la Martinique paralysée par une grève générale et des émeutes

Par 22/11/2022 - 10:13 • Mis à jour le 22/11/2022 - 11:57

À l'appel de 17 organisations syndicales, un grève générale est déclenchée le 22 novembre 2021 pour exiger le retrait de la loi instituant l'obligation vaccinale. Le mouvement déborde rapidement les syndicats tandis que les nuits d'émeutes se succèdent.

    Le 22 novembre 2021 : la Martinique paralysée par une grève générale et des émeutes

Il y a un an, la Martinique sombrait dans la tourmente. D'un côté, 17 organisations syndicales lançaient un mouvement de grève générale illimitée. La première journée de mobilisation consiste en une manifestation dans les rues de Fort-de-France. La situation allait néanmoins rapidement dégénérer.

Las d'attendre devant la préfecture, le millier de manifestants se dirige alors vers le village d'arrivée de la transat Jacques Vabre. La foule pénètre sur le site en arrachant des banderoles avant des prises de parole.

Mais c'est la nuit que la situation dérape. Les barrages routiers installés dans la journée sont maintenus et les délinquants s'en donnent alors à coeur joie. À Sainte-Thérèse, les forces de l'ordre sont visées par des tirs de 9 mm.

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Les premiers barrages sont aussi le théâtre d'agressions envers les automobilistes et notamment les soignants qui tentent d'exercer leur profession malgré la grève.

Les établissements scolaires sont inaccessibles et donc fermés.

Un centre commercial incendié

Les syndicats sont dépassés par la vague de violence. Les personnes sur les barrages s'affranchissent totalement de leur consigne et refusent de lever les blocages. Des barrages inopinés sont mis en place, loin du regard des corps intermédiaires.

Au troisième soir de grève, on dénombre une vingtaine de barrages sur les routes. Plus grave, le centre commercial Kréolis au Robert est la proie d'un important incendie. Des pharmacies et des petits commerces sont pillés à Sainte-Thérèse. Au matin, on découvre également que le radar météo du Diamant a été incendié. Il restera hors d'usage pendant 10 mois.

Face à la dégradation de la situation et la paralysie des négociations, le 25 novembre, le préfet avance le couvre feu à 19 heures. Insuffisant pour juguler la vague de violence armée qui s'empare de la Martinique, sur les barrages la journée et dans les rues une fois la nuit tombée.

Ce jeudi soir, lors d'une tentative de cambriolage à Ducos, un gendarme est grièvement blessé. Une nuit tragique puisqu'un motard de 38 ans perd la vie à Chateauboeuf en percutant des débris jonchant le sol.

L'arrivée du week-end n'apaise pas les tensions. Dans la nuit de vendredi à samedi, la Martinique brûle encore. La station service de Debriand ainsi que le bureau de poste du quartier sont totalement détruits par les flammes. Les pillards éventrent même la Poste à l'aide d'une pelleteuse.

incendie station debriand

Obligation vaccinale et vie chère

La crise en cours cristallise toutes les difficultés de la société martiniquaise. Ce qui pour beaucoup explique l'embrasement généralisé. Les syndicats ne s'y trompent d'ailleurs pas. Sur leur plateforme de revendication figurent, en plus du rejet des mesures sanitaires, la réduction du prix des produits pétroliers et la hausse des salaires pour faire face à la vie chère.

Malgré un calme relatif à la fin de ce premier week-end de mobilisation, les faits de rackets, les agressions sexuelles et les incidents violents se multiplient. À titre d'exemple, la gendarmerie des Trois-Îlets fait l'objet d'un assaut en règle durant plusieurs heures. Le centre de tri de Dillon est cambriolé.

accueil lecornu intersyndicale

Sébastien Lecornu arrive en Martinique le 30 novembre au matin. Il rencontre le jour même l'intersyndicale. Le ministre annonce un plan de déblocage des routes et ouvre les discussions thématiques.

A partir du 2 décembre, les barrages sont dégagés progressivement par les gendarmes et la vie reprend en Martinique. La libération de l'accès au port de Fort-de-France prendra plus de temps. Il faudra l'intervention de justice pour permettre la remise en fonction du poumon économique de l'île.

15 jours d'une parenthèse au cours de laquelle, une vague de violence rarement vue aura submergé la Martinique.

Régression

"Je crois que la Martinique vit aujourd'hui une période de malaise. Ce malaise à mon avis relève d'une régression avec toute une série de problèmes qui s'accumulent et dont la population a le sentiment qu'ils ne sont pas près d'être résolus", analyse André Lucrèce, sociologue.

"Il y a un bilan de la part de la population qui se dit globalement insatisfaite du déroulé de la tendance qui marque notre pays aujourd'hui. La demande de la population et des jeunes en particulier est la résolution des problèmes du quotidien", estime André Lucrèce.

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